Hermès à l'assaut des NFT contrefaisants : Quand le luxe se protège à l’ère du numérique
Le monde du luxe est en pleine effervescence, vibrant au rythme des innovations numériques. Cette nouvelle ère a ouvert des horizons infinis pour les créateurs, mais aussi pour les contrefacteurs. Une décision du Tribunal judiciaire de Paris marque un tournant décisif dans la protection de la propriété intellectuelle dans ce secteur. Hermès, véritable icône du savoir-faire et de l'excellence à la française, a remporté une victoire éclatante contre la société Blao&Co, accusée d'avoir commercialisé des sacs contrefaisant ses modèles emblématiques Birkin et Kelly, ainsi qu'un NFT de ces derniers. Cette affaire inédite met en lumière les défis colossaux de la protection des créations de luxe à l'ère du numérique, où les frontières entre le réel et le virtuel s'estompent, redéfinissant ainsi les règles du jeu pour les maisons de haute couture et les juristes.

Quels étaient les faits de cette affaire ?
La société Hermès a intenté une action en contrefaçon contre Blao&Co, lui reprochant d'avoir commercialisé des sacs à main et un NFT (Non Fungible Tokens) reproduisant illégalement les modèles Birkin et Kelly, ainsi que leur fermoir distinctif. Ces sacs étaient également disponibles sous forme de NFT sur la plateforme Opensea. Hermès a fait valoir que ces reproductions non autorisées constituaient une violation de ses droits d'auteur et de marque.
Quelle a été la décision des juges ?
Le tribunal a reconnu que les modèles de sacs Birkin et Kelly sont des œuvres originales protégées par le droit d'auteur, en raison de leur forme, de leur système de fermeture, de la présence de plaquettes métalliques et de quatre clous de fond. Les juges ont estimé que la combinaison de ces caractéristiques conférait à ces sacs une apparence singulière, portant l'empreinte de la personnalité de leur créateur. De plus, la marque tridimensionnelle d'Hermès, représentant un cadenas fermé, ses attaches et une boucle, a également été jugée contrefaite.
Quelle est la portée de cette décision ?
Cette décision est historique à plusieurs égards. Tout d'abord, elle reconnaît pour la première fois la protection par le droit d'auteur des modèles de sacs de luxe, en raison de leur originalité. Ensuite, elle confirme la protection des marques tridimensionnelles, telles que le fermoir distinctif d'Hermès. Enfin, et surtout, cette décision est novatrice en ce qu'elle ordonne le retrait d'un NFT contrefaisant d'une plateforme en ligne, reconnaissant ainsi la contrefaçon de biens immatériels dans le monde numérique. Le Tribunal a condamné Blao&Co à payer 220 000 euros de dommages-et-intérêts pour la vente de modèles de sacs reproduisant les caractéristiques originales des sacs Kelly et Birkin et d'un NFT représentant un sac sur la plateforme Opensea. Cependant, le Tribunal a écarté l'idée d'un taux de report sur la base du prix de vente de 6 200 euros et 5 833,33 euros, respectivement, pour les sacs Kelly et Birkin, en raison des différences significatives entre les clientèles des sociétés Hermès et Blao&Co, qui ne disposent manifestement pas des mêmes moyens à consacrer à l'achat de sacs à main ou de voyage. En outre, le Tribunal a ordonné le retrait du Non Fongible Token figurant sur la plateforme Opensea afin qu'il soit rendu définitivement inaccessible.
Le monde numérique est-il un nouveau terrain de jeu pour les contrefacteurs ?
Cette affaire met en lumière les enjeux de la protection de la propriété intellectuelle dans le secteur du luxe et de la mode, en particulier à l'ère du numérique. Les marques de luxe doivent redoubler de vigilance face à la reproduction non autorisée de leurs créations, qu'il s'agisse de produits physiques ou de biens immatériels tels que les NFT. La décision du Tribunal judiciaire de Paris envoie un message clair aux contrefacteurs : les créations originales, qu'elles soient physiques ou numériques, sont protégées par la loi, et leur reproduction non autorisée peut entraîner de lourdes sanctions.
Conclusion : La décision du Tribunal judiciaire de Paris dans cette affaire de contrefaçon de sacs Hermès et de NFT est une victoire éclatante pour la protection de la propriété intellectuelle dans le secteur du luxe et de la mode. Elle rappelle que l'innovation et la créativité doivent être respectées et protégées, même dans le monde numérique. Cette décision ouvre la voie à une meilleure protection des créations de luxe et constitue un signal fort envoyé aux contrefacteurs : le luxe et l'originalité ne peuvent être copiés impunément.
Source : TJ Paris, 7 février 2025, RG nº 22/09210
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