Un feu d’artifice est-il une œuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur ?

14/07/2020

Qui dit 14 juillet, dit feu d'artifice ! En effet, lors de la fête nationale, le ciel s'illumine de mille feux. Chaque année, de somptueux spectacles pyrotechniques ravissent les yeux des petits et grands. Cet événement incontournable met en scène le talent incontestable des artificiers français. C'est pourquoi, il est légitime de se demander si un feu d'artifice peut être considéré comme une œuvre de l'esprit protégeable au sens du droit d'auteur.

Les analyses et commentaires de ce blog constituent des réflexions personnelles et n'engagent pas l'Etude Cheuvreux.

Qu'est-ce qu'une œuvre de l'esprit ?

Selon l'article L. 112-1 du Code de la propriété intellectuelle sont protégées par les droits des auteurs « toutes les œuvres de l'esprit quels qu'en soit le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination ».

Il convient de souligner que toutes les créations ne font pas l'objet d'une protection par le droit d'auteur. Pour être considérée comme une œuvre de l'esprit, deux critères cumulatifs doivent être remplis :

  • L'œuvre doit être matérialisée dans une forme concrète, autrement dit, il ne doit pas s'agir d'une simple idée car les idées sont dites de « libre parcours » ;
  • L'œuvre doit être originale, en d'autres termes la création doit porter l'empreinte de la personnalité de son auteur, c'est-à-dire son apport intellectuel ;


Quels sont les œuvres de l'esprit protégées par le droit d'auteur ?

L'article L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle dresse une liste non exhaustive des œuvres de l'esprit pouvant être protégées.

La jurisprudence assure protection à des œuvres qui ne sont pas nommées dans le Code de la propriété intellectuelle dès lors qu'elles répondent aux exigences de création de forme et d'originalité visées supra.

La Cour de cassation a ainsi admis que puisse être protégé au titre des droits d'auteur un spectacle pyrotechnique.

En effet, le 17 juin 1989, la société "La Mode en Image" a organisé un spectacle sonore et visuel, afin de célébrer le centième anniversaire de la construction de la Tour Eiffel. Un feu d'artifice a ainsi été tiré pour l'occasion.

Plusieurs photographies ont été prises lors de la célébration et certaines ont ensuite été vendues sous forme de cartes postales.

La société "Mode et Image" a alors invoqué la qualité d'œuvre de l'esprit de son spectacle et plus particulièrement du feu d'artifice pour interdire l'exploitation de son œuvre à travers la commercialisation de cartes postales, sans son autorisation.

Les sociétés à l'origine de la création des cartes postales, ont avancé le fait que la société "La Mode en image" ne pouvait revendiquer un droit privatif sur « l'événement symbolique que constituait le centenaire de la Tour Eiffel », dans la mesure où un tel droit se heurterait aux exceptions autorisées au droit d'auteur.

Dans une décision rendue par la première chambre civile de la Cour de cassation le 3 mars 1992, les juges ont considéré que « la composition de jeux de lumière destinés à révéler et à souligner les lignes et les formes du monument constituait une "création visuelle" originale, et, partant, une œuvre de l'esprit » ainsi protégeable par le droit d'auteur.

Line JOAS.

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